Jean Ă©teignit la radio. ComÂment allait-t-il s’orÂganÂisÂer ? Ses deux semaines de garde se
terÂmiÂnaient et il craigÂnait que le rouleÂment rouÂtinier ne se fasse pas comme prĂ©vu. L’homme
ne s’inÂquiĂ©Âtait pourÂtant pas. Un colÂlègue viendrait sĂ»reÂment Ă sa renÂconÂtre le lendeÂmain. Il
devait juste s’armer d’un peu de patience. Il n’avait plus beauÂcoup de vivres. Il ouvrit les
placÂards de la cuiÂsine : pâtes, riz, cafĂ©. Bref, le trio traÂdiÂtionÂnel. Le rĂ©frigĂ©raÂteur ? Il ne l’ouÂvrit
mĂŞme pas. Il savait dĂ©jĂ qu’il Ă©tait quaÂsiÂment vide. Ce qu’il avait entenÂdu aux inforÂmaÂtions
n’éÂtait pas bien rĂ©jouisÂsant. Le virus galopait et s’emparait peu Ă peu de l’HexaÂgone. Le foyÂer
Ă©pidĂ©mique d’oÂrigÂine se jouait bien des fronÂtières et riait Ă prĂ©sent au nez de l’huÂmanÂitĂ© en
dĂ©roulant son tsunaÂmi pandĂ©mique inatÂtenÂdu et ravageur. La France receÂvait Ă son tour la
dĂ©ferÂlante de cette Ă©norme vague mortelle qui se rĂ©pandait sur tous les terÂriÂtoires europĂ©ens
et frapÂperait assurĂ©Âment, sans prĂ©venir et ausÂsi rapiÂdeÂment le monde entier. MalÂgrĂ© leur
senÂtiÂment de supĂ©riÂorÂitĂ©, les plus grandes puisÂsances n’y pourÂraient rien. Les civilÂiÂsaÂtions
s’apÂprĂŞÂtaient Ă affronÂter une catÂaÂstroÂphe virale surÂgisÂsant des enfers ; elles Ă©taient Ă l’aube
d’une page d’HisÂtoire sans savoir comÂment elle s’achèverait.
Jean Ă©tait bien isolĂ©, Ă sept kiloÂmètres des cĂ´tes de la Gironde sur le plateau de CorÂdouan,
dans la lignĂ©e de ces gĂ©nĂ©raÂtions de garÂdiÂens de phare amoureux de la mer. Ce soir-lĂ , il
s’enÂdorÂmit en se senÂtant finaleÂment proÂtĂ©gĂ© et privÂilĂ©giĂ© de rĂ©sider dans un lieu mythique au
conÂfluÂent de la Garonne et de la DorÂdogne, aux portes de l’AtÂlanÂtique.
Les aiguÂilles de l’horÂloge Ă©grenaient les secÂonÂdes, les minÂutes puis les heures dans une lenteur
incesÂsante et cadencĂ©e. La tour blanche domÂiÂnait l’omÂbre des flots dont les mouÂveÂments,
brisĂ©s par la cuirasse du bâtiÂment, difÂfuÂsaient le son des ondes marÂitimes. A soixÂante-sept
mètres de hauÂteur, le feu Ă trois occulÂtaÂtions toutes les douze secÂonÂdes faiÂsait danser Ă
interÂvalles rĂ©guliers ses rayons de lumière allant tous se posÂer sur la ligne d’horiÂzon.
Les traces invisÂiÂbles de la nuit glisÂsèrent en un Ă©clair sur la peau tanÂnĂ©e du garÂdiÂen. La clartĂ©
naisÂsante de l’aube prit le pas sur les faisÂceaux rouges et verts de la passe sud et ouest qui
avaient inlassÂableÂment indiquĂ© la voie aux navires de faible tirant d’eau d’une part, et le
chemin aux vaisÂseaux de comÂmerce de fort tonÂnage d’autre part. Le rĂ©veil se fit en douceur.
Jean ouvrit paisÂiÂbleÂment ses paupières. Ses oreilles Ă©taient dĂ©jĂ tout ouĂŻe et entendaient le
chant rauque et sonore des mouÂettes rieuses. Il s’étiÂra, dĂ©tenÂdit tous les musÂcles de son corps
et posa ses bras le long de ses flancs, sur la couÂverÂture. Pour la preÂmière fois, il prit le temps
d’obÂservÂer sa chamÂbre. Il Ă©tait dans un nid douilÂlet habilÂlĂ© de bois du sol au plaÂfond : le
parÂquet de chĂŞne masÂsif point de HonÂgrie et les cloiÂsons lamÂbrisÂsĂ©es aux courÂbuÂres agrĂ©ables
au regard ajoutaient de la chaleur Ă l’amÂbiance atemÂporelle de la vie au phare. Les patins,
touÂjours rangĂ©s au pied du lit, attendaient leur proÂpriĂ©Âtaire qui, chose peu comÂmune, tarÂdait Ă
arrivÂer. Après un long moment d’oisivetĂ©, Jean sorÂtit de son lit pour procĂ©der Ă sa toiÂlette.
Après sa douche, il obserÂva l’éÂtat de son visÂage dans le miroir. Il n’avait aucuneÂment envie de
rasÂer sa barbe de trois jours, alors il sorÂtit de la pièce pour rejoinÂdre la cuiÂsine. Quelques
minÂutes plus tard, le garÂgouilleÂment de la machine Ă cafĂ© se fit entenÂdre. Le garÂdiÂen prit une
tasse, y mit un sucre et y verÂsa le liqÂuide bouilÂlant avant de se renÂdre dans le bureau pour
allumer l’orÂdiÂnaÂteur et conÂsulÂter ses mesÂsages : le colÂlègue qui devait le relayÂer lui indiÂquait
que la carÂgaiÂson de nourÂriÂtÂure arriverait Ă la preÂmière marĂ©e basse de la journĂ©e. Jean but une
gorgĂ©e de sa boisÂson chaude avant de retournÂer Ă la cuiÂsine. Il dĂ©coupa une tranche de pain, la
tartiÂna de beurre puis y ajouÂta un peu de conÂfiÂture d’abriÂcot faite maiÂson. Il resÂta debout et
rĂ©flĂ©Âchit au traÂvail qu’il allait entreÂprenÂdre. Il astiÂquerait les Ă©lĂ©Âments en cuivÂre des meubles
et des portes, netÂtoierait le parÂquet ainÂsi que la goutÂtière du preÂmier Ă©tage qui sert Ă la
rĂ©cupĂ©raÂtion des eaux de pluie. Le bateau de ravÂiÂtailleÂment arriverait sĂ»reÂment entre-temps.
Jean avala la dernière bouchĂ©e de sa tarÂtine, prit un balÂai et se renÂdit immĂ©ÂdiÂateÂment sur le
balÂcon du roi pour comÂmencer le netÂtoyÂage. La saiÂson tourisÂtique n’avait pas encore dĂ©butĂ©
et, Ă cause de la crise sanÂiÂtaire, ne pourÂrait peut-ĂŞtre pas avoir lieu. Ce serait un terÂriÂble
manque Ă gagÂnÂer pour le financeÂment de la mainÂteÂnance et de la prĂ©serÂvaÂtion de ce joyÂau,
inscrit au patÂriÂmoine des monÂuÂments hisÂtoriques, qui veille depuis plus de quaÂtre sièÂcles sur
l’esÂtuÂaire de la Gironde. Il falÂlait espĂ©rÂer que cette prouesse archiÂtecÂturale en pierÂres de taille
sculpÂtĂ©es puisse encore ĂŞtre entretenue par des hommes ausÂsi pasÂsionÂnĂ©s que lui et rĂ©sisÂter
au temps et aux attaques de l’ocĂ©an grâce aux grandes camÂpagnes de travaux. Cette
majestueuse habiÂtaÂtion, foyÂer lumineux au beau milieu de l’ocĂ©an, est le dernier vesÂtige des
mers habitĂ© en France. Sa beautĂ©, assoÂciĂ©e Ă sa posiÂtion stratĂ©gique attracÂtive, en font une
desÂtiÂnaÂtion tourisÂtique fort prisĂ©e.
Jean jeta un coup d’oeil au-dessus de la ramÂbarde. La marĂ©e descendait et l’embarcation du
livreur de coursÂes n’éÂtait plus très loin. Il posa le balÂai, dĂ©vala l’escalier, ouvrit la poterne du
temÂple qui donne accès au soubasseÂment, et ne tarÂda pas Ă voir Paul et Franck dĂ©barÂquer.
— Wep ! Salut les mecs ! C’est « cool » de vous voir ! Un peu d’compagnie ! Mais qu’est-ce que
tu fous lĂ , Paul ?
— Je reste avec toi.
— Non, c’est vrai ?
— Oui, si je t’le dis. J’ai eu l’auÂtoriÂsaÂtion.
— En quel honÂneur ?
— Les supĂ©rieurs ont estimĂ© qu’il Ă©tait trop Ă©prouÂvant et danÂgereux de laissÂer seuleÂment un
gars sur le phare trop longtemps.
— Putain de bonne nouÂvelle ! Ce n’est pas que je trouÂvais le temps long mais ça fait du bien de
parÂler Ă quelqu’un.
— J’te crois mon gars ! Mais en fait je blaguais, tu pensÂes ! En fait les chefs n’se traÂcasÂsaient
pas. Alors j’ai un peu insistĂ© tu vois. Du coup, me voilĂ ! Tu vas devoir me supÂportÂer. On est
dans l’mĂŞme bateau. Ah, ah… PlutĂ´t le mĂŞme phare, j’suis con. Allez, viens nous aider Ă
transÂporter les malles rĂ©frigĂ©rĂ©es et les packs d’eau.
— Ça va Franck ?
— Ouais ! Y’en a pour au moins trois semaines.
— Ah bon ? Tu n’pourras pas revenir ?
— Si, mais le gouÂverneÂment veut minÂimiser les dĂ©placeÂments alors…
— Oui, j’ai entenÂdu ça, mais bon… MĂŞme pour le transÂfert de la bouffe ? DĂ©bile.
— C’est sĂ»r ! Si vous avez besoin, vous m’apÂpelez. MainÂtenant, il n’y a plus que moi pour les
navettes de vivres. Les autres ont Ă©tĂ© mis sur la touche. RĂ©ducÂtion des conÂtacts. Du coup
rĂ©ducÂtion des Ă©quipes.
— BorÂdel, j’y crois pas…
— Tu l’as dit ! Bon, norÂmaleÂment vous avez tout ce qu’il faut.
— Oui, j’vois ça. QuaÂtre malles ! Au moins on n’va pas mourir de faim.
— Bon, les gars, ce n’est pas que je m’enÂnuie mais je dois y aller.
— Attends ! Prends les poubelles, s’il-te-plait. Tiens ! Les carÂtons, les plasÂtiques et les dĂ©chets
mĂ©nagers. DĂ©solĂ© mais comme je ne peux pas retournÂer, c’est toi qui te tapes la corvĂ©e de
poubelles.
— Pas d’souci. T’exÂcusÂes pas, il faut bien les ramenÂer Ă la dĂ©chetÂterie.
— Allez, ne traîne pas ! A plus.
— RenÂtre bien, Franck.
— Ouais. Courage, les gars !
Les deux hommes ouvrirent les difÂfĂ©rentes caissÂes et rangèrent soigneuseÂment l’ensemÂble des
victÂuailles. A peine avaient-ils fini qu’ils enchaĂ®nèrent sur la prĂ©ÂpaÂraÂtion du repas. Ils n’avaient
pas de monÂtre, mais le rythme des marĂ©es marÂquait les repères quoÂtiÂdiÂens. Jean Ă©pluchait les
oignons, Paul les pommes de terre pour ensuite metÂtre le tout dans une cocotte. PenÂdant la
cuisÂson, les deux comÂpères en profÂitèrent pour balÂayÂer la cuiÂsine, jeter les dĂ©chets organiques
dans la basÂsine desÂtinĂ©e Ă les rĂ©cupĂ©rÂer puis mirent la table, disÂposèrent les bouteilles d’eau
dans un placÂard, sorÂtirent quaÂtre merÂguez du rĂ©frigĂ©raÂteur et les firent griller. Le tourniÂquet
de l’auÂtocuiseur sifÂflait Ă tue-tĂŞte. C’éÂtait prĂŞt. Les deux amis instalÂlèrent les plats et
mangèrent avec appétit.
— On se fait une balade ce soir ?
— Bonne idée, c’est pas d’refus. On fait ça après le boulot…
— Tu veux faire quoi ?
— J’astique les cuivÂres et je fais le planchÂer, ça te va ?
— D’accord, alors je me paye les marchÂes
— Waouh… ChaÂpeau! J’t’aiderai quand j’aurai fini. T’auras jamais terÂminĂ© ces putains de
marchÂes ce soir !
— T’as p’t’être raiÂson. On verÂra bien !
Les deux garÂdiÂens dĂ©barÂrassèrent la table et ne tardèrent pas Ă s’afÂfairÂer. Jean frotÂtait avec
Ă©nergie les bouÂtons de cuivÂre des meubles d’époque, les poignĂ©es des portes, les loquets et les
clenchÂes, ainÂsi que les plaques des serÂrures. Paul avançait marche après marche.
— Paul, tu t’en sors ?
— Foutues marchÂes ! Ça fait tranÂspirÂer.
— Je vais cirÂer le parÂquet de ma chamÂbre et j’arÂrive.
— J’y compte bien.
Le ciel Ă©tait d’un bleu Ă©claÂtant. La mer calme. Un temps idĂ©al.
Jean dĂ©pousÂsiĂ©ra tout d’abord le parÂquet Ă l’aide d’un balÂai puis d’une serÂpilÂlière Ă peine
humidÂiÂfiĂ©e. En suivÂant, il verÂsa une quanÂtitĂ© d’huile de lin dans un rĂ©cipÂiÂent de petite taille et y
plongea son chifÂfon tout ausÂsi sec que le parÂquet au mĂŞme moment. Il s’ageÂnouilÂla au fond de
la pièce et comÂmença par appliÂquer cette soluÂtion effiÂcace et Ă©cologique en se dĂ©plaçant en
ligne, de la gauche vers la droite, tout en proÂgresÂsant vers la sorÂtie. La surÂface Ă©tait Ă prĂ©sent
comÂplèteÂment enduite du proÂduit. Un sourire de conÂtenteÂment apparut sur le visÂage du
garÂdiÂen. Sa misÂsion Ă©tait accomÂplie. Le liqÂuide allait s’inÂfilÂtrÂer dans les pores du bois et renÂdre
la matière hydrofuge. Le parÂquet cirĂ© serait Ă nouÂveau proÂtĂ©gĂ© de l’huÂmidÂitĂ© en devenant
imperÂmĂ©able et le bois pourÂrait respirÂer en retrouÂvant couleur et vitalÂitĂ©. Jean se redresÂsa et
resÂta quelques secÂonÂdes dans l’embrasure de la porte pour admirÂer son traÂvail. Le parÂquet
avait retrouÂvĂ© tout son Ă©clat. Il enchaĂ®Âna avec les trois autres petites chamÂbres avant d’aller Ă
la renÂconÂtre de Paul. Il rejoignit le vestibule avant de gravir l’inÂcroyÂable escalier, le balÂai Ă la
main.
— Eh ben, tu t’en sors bien ! SacrĂ© exerÂciÂce, hein ?
— T’as fini ?
— Ouais. On est tranÂquille pour un mois. Le parÂquet est superbe.
— ParÂfait !
— Bon, j’te prête main forte.
— Ah ça, j’veux bien.
Le netÂtoyÂage fut long mais la rĂ©comÂpense subÂlime. La fin de leur ascenÂsion dĂ©voilait un point
de vue Ă couper le soufÂfle. Ce n’éÂtait pourÂtant pas la preÂmière fois qu’ils avaient droit Ă ces
trois cent soixÂante degrĂ©s sur le bassin, mais la splenÂdeur des lieux se renouÂveÂlait sans cesse
et offrait un tableau impresÂsionÂnant de beautĂ©. Leur conÂnexÂion avec les Ă©lĂ©Âments Ă©tait Ă son
paroxÂysme. Leurs regards se posaient tour Ă tour sur l’ocĂ©an, la pointe de la presqu’île, le
bassin d’ArÂcaÂchon et la dune du Pilat. Le jour arrivait Ă sa fin. Au loin, l’Île aux Oiseaux les
renÂvoya au couchÂer de soleil vĂ©cu lors de la dĂ©couÂverte des cabanes tchanÂquĂ©es. Ils se
souÂveÂnaient de cette balade, pieds nus dans la vase, lorsqu’ils les virent lĂ oĂą l’on ne s’y attend
pas. Cette excurÂsion Ă©tait Ă jamais restĂ©e gravĂ©e dans leur mĂ©moire car lors de cette preÂmière
vision, ces habiÂtaÂtions conÂstruÂites de bois et sur piloÂtis, se dresÂsaient fièreÂment au-dessus de
l’eau dans une magie indeÂscriptible sous les derniers rayons de soleil. Ce conÂfineÂment allait
offrir l’opÂporÂtuÂnitĂ© de renaĂ®tre Ă la vie en totale osmose avec cette nature si gĂ©nĂ©reuse. Les
regards sur le monde devaient changÂer, les menÂtalÂitĂ©s Ă©voluer, les priÂorÂitĂ©s se redĂ©finir. La
planète vivait en noir et blanc depuis des dĂ©cenÂnies. Quand allions-nous pouÂvoir proÂgramÂmer
un avenir en couleur comme celles immacÂulĂ©es de l’arc-en-ciel ? L’huÂmanÂitĂ© tout entière Ă©tait
en marche vers son extincÂtion sans comÂprenÂdre que l’ensemÂble des maux et des colères sont
fomenÂtĂ©s et nourÂris par nos semÂblables, fourÂmilÂière sans nom subÂmergĂ©e par les flots de
l’éÂgoĂŻsme, de la jalousie, du pouÂvoir, de la richesse et de la haine. Cette armĂ©e de robots,
forÂmatĂ©e par un quoÂtiÂdiÂen instruÂmenÂtalÂisĂ©, creuÂsait non seuleÂment nos tombes mais
Ă©galeÂment le trou qui pourÂrait nous conÂduire Ă un quesÂtionÂnement douloureux et au dĂ©saveu
de nos valeurs morales les plus nobles.
Jean redescendait avec Paul tout en penÂsant Ă´ comÂbiÂen il se senÂtait ĂŞtre une vieille âme.
Depuis des annĂ©es, il suivÂait sa route en soliÂtaire en pasÂsant devant les appâts du
matĂ©riÂalÂisme sans jamais s’arÂrĂŞter et ne s’atÂtachait pas au superÂfiÂciel des relaÂtions humaines.
Il se senÂtait en marge du comÂmun des morÂtels. Pour lui, la conÂnaisÂsance Ă©tait le pouÂvoir, la
sagesse, le reflet du bonÂheur, et la vĂ©ritĂ©, la porte vers la libÂertĂ©. Il cherÂchait la lumière pour
proÂmouÂvoir la paix et l’amour. Comme toutes les vies, la sienne Ă©tait Ă©phĂ©mère et il devait
l’aborÂder de la façon la plus judiÂcieuse pour apporter sĂ©rĂ©nitĂ© Ă son âme et staÂbilÂitĂ© Ă sa
rĂ©flexÂion. Il avait fait le choix d’être au milieu des eaux pour se dĂ©tachÂer du monde qu’il
trouÂvait vioÂlent et laid mais ausÂsi pour fuir la fatigue menÂtale gĂ©nĂ©rĂ©e par le conÂtexte
enviÂronÂnemenÂtal et retrouÂver le calme intĂ©rieur de l’enÂfant qu’il avait touÂjours Ă©tĂ©.
— Jean ?
— Oui ?
— On la fait cette balade nocÂturne ?
— Déjà la marée basse ?
— Oui. Tiens ! Ta lampe.
— MerÂci.
Les deux hommes, munis de leurs bottes et de leur lampe frontale, se rendirent sur l’esÂtran
pour partager un moment riche et intense de bien-ĂŞtre Ă se retrouÂver au cĹ“ur de la faune et
de la floÂre marine, loin de la pandĂ©mie. Du haut de son trĂ´ne, la lune veilÂlait sur eux.